Читать «Le Voleur d"Or (Золотой вор)» онлайн - страница 225

Марсель Аллен

Juve prit une seconde pour réfléchir avant de répondre.

— Voyons, se dit le policier, quel parti dois-je prendre ? Que dois-je faire ? accepter ou refuser ?

Juve, passant ces deux hypothèses en revue, se rendait compte qu’elles ne lui étaient favorables ni l’une ni l’autre.

Si par aventure Juve refusait de donner des leçons qu’on le sollicitait d’accorder, il risquait de perdre tout crédit chez les Grouilleurs, et ce crédit pouvait lui être utile.

Si, d’autre part, il acceptait de donner ces leçons, les pires événements pouvaient survenir.

— Fichue histoire ! grogna Juve. Du diable si je sais que dire !… D’autant que si j’accepte, ces animaux-là vont certainement se rendre compte qu’ils sont beaucoup plus habiles que moi !… Je ne sais pas voler, que diable !… Ils découvriront donc que je ne suis pas Job Askings !

Juve, à la vérité, lorsque Bouzille l’avait conduit la première fois à l’Enfer, lorsque l’idée lui était venue de se faire passer pour Job Askings, avait bien eu l’audace de commettre devant les Grouilleurs un premier vol, il avait dépouillé le chef de ses armes. Mais lorsque Juve avait agi ainsi, c’était à l’improviste ; on n’épiait pas ses gestes. Les choses, de plus, s’étaient présentées de façon assez facile.

Désormais, tout au contraire, il était évident qu’il allait lui falloir être d’une habileté consommée pour duper ceux qui prétendaient être ses élèves.

Juve, qui se souvenait en effet du père Grelot, l’ingénieux professeur de vol que Fandor avait quelque temps fréquenté, songeait qu’il est fort difficile d’enseigner l’art de dépouiller son prochain. Sa maladresse pouvait éclater, devait éclater même. Devait-il en courir le risque ?

Juve hésitait, mais n’hésitait pas longtemps.

Il y a des moments dans la vie où la pensée se trouve douée d’une activité formidable et quelque peu prodigieuse.

Alors les événements les plus complexes, les raisonnements les plus délicats s’évoquent avec une rapidité folle.

Juve vivait une de ces heures où il faut et où l’on peut penser vite.

Tandis que le chef des Grouilleurs attendait sa décision avec une anxiété qui n’était pas feinte, car le misérable estimait que son fils, dressé par le Roi des voleurs, arriverait rapidement à la fortune, Juve réfléchit, calcula, songea.

Et certainement le policier inventait alors quelque chose d’extraordinaire, de stupéfiant.

À mi-voix, suivant son habitude, Juve grommelait en effet :

— Donner une leçon de vol, mon Dieu, j’en suis incapable !… En prendre une, tout au contraire, cela pourrait m’être fort utile !… D’autant plus que, demain, je pourrais bien avoir besoin de savoir voler !

Elles était étranges, ces paroles, elles étaient énigmatiques. Elles marquaient cependant ce qui allait être de la part de Juve une décision irrévocable.

— Fais venir ton fils ! ordonna le policier. Je ne sais si je pourrai me charger de le dresser !… Je ne pourrai le faire qu’à condition qu’il me paraisse réellement habile, réellement adroit, réellement doué… Je veux l’interroger, je veux le faire travailler devant moi, ensuite je saurai quoi te répondre !