Читать «Le Voleur d"Or (Золотой вор)» онлайн - страница 220

Марсель Аллен

— Une surprise ? Quand ? Laquelle ?

— Monsieur aura une surprise à dîner !

Juve reprit son air sérieux.

— Jean, déclarait-il, si tu ne me réponds pas à la minute, je ne te ficherai pas à la porte, parce que tu t’en moques absolument. Je te flanquerai bel et bien une tripotée dont tu te souviendras ! Quelle est ta surprise ?

— Monsieur, répondit Jean, j’ai fait un gigot pour ce soir… Monsieur fera un bon dîner.

— Non, dit Juve, car je ne dînerai pas ici !

Et, de fait, malgré les supplications du dévoué valet de chambre qui pleurait presque à la pensée qu’un second gigot allait se perdre sans avoir eu les honneurs de paraître sur la table de Juve, le policier se levait, s’habillait.

Juve n’était jamais long à faire sa toilette, mais ce jour-là, cependant, il y apportait un soin extrême. Juve se rasait précautionneusement, choisissait un complet qui avait bonne élégance, enfilait un pantalon dont le pli était impeccable.

— Jouons la difficulté, se disait-il. Il s’agit d’impressionner ces lascars !

Quarante minutes après, Juve était habillé. Il consentait alors, pour ne point trop fâcher le vieux Jean, à dîner rapidement. Juve, toutefois, ne savourait pas le fameux gigot que le valet de chambre apportait sur la table avec un air de triomphe.

Juve était visiblement préoccupé, anxieux ou inquiet même.

— Il s’agit maintenant, murmurait-il, de jouer serré ! J’ai perdu un jour, mais cela n’a pas d’importance !

À la dernière bouchée, Juve, ayant avalé son café brûlant et pris un cigare, quitta la rue Tardieu.

Où allait-il donc ?

À coup sûr, Juve partait en expédition. Il partait même en expédition périlleuse, car il avait soigneusement vérifié le magasin de son browning et glissé des cartouches neuves dans cette arme fidèle.

Au bas de la rue Tardieu, Juve arrêta un taxi-auto :

— Menez-moi, commanda-t-il, au pont des Arts.

Une fois arrivé là, Juve quittait sa voiture et traversait la Seine. Le policier, quelque temps, flâna sur les quais, fumant toujours, paraissant attendre quelque chose ou quelqu’un. Juve, à ce moment, tout bonnement, attendait que la nuit se fût faite obscure, que les quais fussent entièrement déserts. C’était seulement lorsqu’on commençait à ne plus voir clair, lorsqu’il devenait impossible de distinguer du parapet des trottoirs, l’extrémité des berges, que Juve se hasardait à y descendre.

Mais où allait donc le policier ?

Juve, tout bonnement, retournait à l’Enfer. Il lui fallait, en vérité, une dose d’audace extraordinaire pour affronter ainsi à nouveau les Grouilleurs !

Mais ce n’était pas l’audace qui manquait à Juve.

Le policier, d’ailleurs, n’avait-il pas quelque raison secrète pour agir ainsi ?

Juve n’était cependant pas homme à se risquer au hasard. Il n’était point homme non plus à reculer devant une tentative qui pouvait avoir des résultats profitables.

Juve, comme s’il eût fait la manœuvre la plus simple et la plus ordinaire du monde, s’avança jusqu’au bord de la berge.

À nouveau, il se laissa glisser au-dessus du fleuve, à nouveau il heurta du pied les vantaux de la porte.