Читать «Le Voleur d"Or (Золотой вор)» онлайн - страница 10

Марсель Аллен

Ce soir-là, l’émotion de M me Drapier était plus grande qu’à l’ordinaire, car il y avait un nouveau venu dans la maison…

En réalité, bien qu’elle s’accusât souvent de pusillanimité, M me Drapier se convainquit que rien n’était dangereux comme d’introduire du jour au lendemain, sous prétexte qu’il était « domestique », un inconnu dans sa maison.

Et puis enfin, son mari n’avait-il pas remarqué, comme elle d’ailleurs, les yeux de cet homme, son regard intelligent, mystérieux, inquisiteur, regard qui n’était pas celui d’un valet de chambre ordinaire ?

L’appartement était grand, il paraissait immense ce soir-là à M me Drapier.

D’autant plus que sa chambre et son cabinet de toilette se trouvaient tout à l’opposé de la chambre de son mari, laquelle était voisine du cabinet de travail.

Il fallait, pour aller de chez M me Drapier à la chambre de M. Drapier, traverser le grand salon, le petit salon, le fumoir et la salle à manger, ou alors suivre cette interminable galerie sur laquelle s’ouvraient toutes ces pièces.

Revenue enfin dans son cabinet de toilette, après avoir depuis longtemps souhaité le bonsoir à son époux, M me Drapier, qui se sentait un peu fatiguée, se mit en devoir de se dévêtir.

Elle alluma toutes les ampoules électriques, fit beaucoup de lumière pour avoir moins peur ; puis, machinalement, par habitude, et parce qu’elle faisait cela depuis vingt ans, elle se mit, non sans ennui, à couvrir son visage, sa poitrine, ses mains et ses bras de pâtes et d’onguents destinés, lui assurait la marchande, à donner à sa peau l’éclat et le velouté d’une peau de vingt ans !

Hélas ! malgré tous les artifices, la peau de M me Drapier avait bien près de cinquante ans et tous les onguents étaient inutiles…

Ayant orné sa chevelure d’une quantité incommensurable de bigoudis, M me Drapier finit par aller se coucher.

Elle voulut lire un journal, elle n’y trouva que des histoires de crimes ; elle le rejeta dans la ruelle de son lit et, ayant mis sa lampe en veilleuse, chercha à s’endormir.

Elle y parvint aisément.

M me Drapier dormait d’un sommeil lourd et profond, lorsque brusquement elle sursauta dans son lit.

Sa gorge se serra, ses paupières battirent, elle sentit sur son front et ses mains courir les frissons précurseurs d’une transpiration déterminée par l’inquiétude.

Puis elle prêta l’oreille, doutant de ce qu’elle avait cru entendre alors que peut-être elle dormait encore.

M me Drapier avait l’impression qu’on avait marché dans la galerie de l’appartement.

Sous les tapis épais, le plancher avait craqué, puis ç’avait été le bruit d’une porte qui s’ouvre et se referme lentement.