Читать «Константин Бальмонт и поэзия французского языка/Konstantin Balmont et la poésie de langue française (билингва ru-fr)» онлайн - страница 10

Константин Бальмонт

La géante/Гигантша

Du temps que la Nature en sa verve puissante Concevait chaque jour des enfants monstrueux, J'eusse aimé vivre auprès d'une jeune géante, Comme aux pieds d'une reine un chat voluptueux. J'eusse aimé voir son corps fleurir avec son âme Et grandir librement dans ses terribles jeux; Deviner si son cœur couve une sombre flamme Aux humides brouillards qui nagent dans ses yeux; Parcourir à loisir ses magnifiques formes; Ramper sur le versant de ses genoux énormes, Et parfois en été, quand les soleils malsains, Lasse, la font s'étendre à travers la campagne, Dormir nonchalamment à l'ombre de ses seins, Comme un hameau paisible au pied d'une montagne. В оны дни, как природа в капризности дум, вдохновенно Каждый день зачинала чудовищность мощных пород, Полюбил бы я жить возле юной гигантши бессменно, Как у ног королевы ласкательно-вкрадчивый кот. Я любил бы глядеть, как с душой ее плоть расцветает И свободно растет в ужасающих играх ее; Заглянув, угадать, что за мрачное пламя блистает В этих влажных глазах, где, как дымка, встает забытье. Пробегать на досуге всю пышность ее очертаний, Проползать по уклону ее исполинских колен, А порой в летний зной, в час, как солнце дурманом дыханий На равнину повергнет ее, точно взятую в плен, — Я в тени ее пышных грудей задремал бы, мечтая, Как у склона горы деревушка ютится глухая.

Le balcon/Балкон

Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses, O toi, tous mes plaisirs! ô toi, tous mes devoirs! Tu te rappelleras la beauté des caresses, La douceur du foyer et le charme des soirs, Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses! Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon, Et les soirs au balcon, voilés de vapeurs roses. Que ton sein m'était doux! que ton cœur m'était bon! Nous avons dit souvent d'impérissables choses Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon. Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées! Que l'espace est profond! que le cœur est puissant! En me penchant vers toi, reine des adorées, Je croyais respirer le parfum de ton sang. Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées! La nuit s'épaissisait ainsi qu'une cloison, Et mes yeux dans le noir devinaient tes prunelles, Et je buvais ton souffle, ô douceur! ô poison! Et tes pieds s'endormaient dans mes mains fraternelles. La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison. Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses, Et revis mon passé blotti dans tes genoux. Car à quoi bon chercher tes beautés langoureuses Ailleurs qu'en ton cher corps et qu'en ton cœur si doux? Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses! Ces serments, ces parfums, ces baisers infinis, Renaîtront-ils d'un gouffre interdit à nos sondes, Comme montent au ciel les soleils rajeunis Après s'être lavés au fond des mers profondes? Ô serments! ô parfums! ô baisers infinis!