Читать «Чёрная речка. До и после (К истории дуэли Пушкина)» онлайн - страница 32

Серена Витале

VI

Pétersbourg

Malgré votre défense, je commencerai cependant ma lettre par vous remercier de cette nouvelle marque de bonté de votre part; ne vouloir pas seulement que je pâtisse de mes sottises, c'est pousser l'indulgence à l'extrême. Mais mon cher ami, pourquoi vous gêner maintenant et payer au moment où vous avez besoin d'argent. Le billet a été fait pour 18 mois, Stéphany a dû vous le dire, de sorte que vous auriez tout le temps de terminer cette affaire. J'étais sûr que Stéphany vous plairait, c'est un homme tout à fait bien et votre idée de vouloir vous fixer aux environs de Fribourg est charmante. Car comme vous dites, nous serions pour ainsi dire en famille, car maintenant vous en êtes aussi. Puis c'est près de la France, un pays magnifique; vous devriez profiter de votre séjour à Soulz pour aller y faire une excursion, c'est un voyage de 10 heures. Et puis la vie y est excessivement bon marché, c'est presque pour rien, mais comme je vous ai dit plus haut il faut absolument que vous alliez voir si le pays est d'après votre goût, d'autant plus que je vous annonce que vous ne vous amuserez guère à Soulz qui est au fond un vilain trou. Et j'oubliais de vous dire aussi que mon père a un très grand bien à 3 heures de Fribourg. Sur les bords du Rhin, de sorte qu'il ne sera peut-être pas impossible de trouver une propriété qui toucherait à celle de mon père. Je vous assure que c'est une idée ravissante et puisque vous aimez maintenant aussi mon frère, nous pourrons nous marier et vivre presque tous ensemble et vous garder tout à notre aise. J'ai reçu une lettre d'Alphonse et je puis vous assurer que la conquête est tout à fait réciproque et si je ne le savais pas si bon frère je le croirais presque jaloux de mon sort.

Le comte Lerchenfeld est arrivé avec sa femme. Il fait une figure de l'autre monde, et parle plus doucement que jamais; quant à sa chaste moitié, elle est loin de mériter le ravissant portrait qu'en a fait Bray. C'est une petite femme assez brune, très insignifiante, se mettant fort mal et sans aucun goût, ce qui fait qu'elle ne brillera pas à Pétersbourg où les femmes se mettent si bien.

Vous serez bien étonné d'apprendre la mort de cette pauvre princesse Gagarine Bobonne. On l'a enterrée aujourd'hui. Cette pauvre femme a fini bien malheureusement et bien subitement, elle a été étouffée dans l'espace de quelques heures et quand on a ouvert son corps, il était tout à fait rongé par la gangrène.