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Федор Иванович Тютчев

Аксакову И. С., 9 августа 1863

16. И. С. АКСАКОВУ 9 августа 1863 г. Москва

Прошу вас убедительно, почтеннейший Иван Сергеевич, делать с моими виршами что вам угодно — т. е. изменить, поправить и усилить… Спешу, уезжаю сегодня и поручаю себя вашему дружественному расположению. — Когда будете писать к Анне? Вам пред<анный> Ф. Тютчев

P. S. Вместо слова бессмысленной, не лучше ли неистовой?

Тютчевой Е. Ф., 26 августа 1863

17. Е. Ф. ТЮТЧЕВОЙ 26 августа 1863 г. Петербург

Pétersbourg. Lundi. 26 août 1863

Merci, ma fille chérie, de votre bonne lettre qui m’a fait grand plaisir. J’espère que celle-ci t’arrivera à point nommé pour te souhaiter la bienvenue à Moscou. — Et moi aussi j’ai ressenti comme une fâcheuse privation ton absence de Moscou pendant les deux mois de séjour que j’y ai fait et qui m’ont laissé un très bon souvenir, un souvenir lumineux en dépit du mauvais temps. J’y ai été témoin de quelque chose, à quoi on ne saurait contester une signification historique. C’est l’accueil fait par l’opinion aux dépêches du P<rinc>e Gortchakoff. — C’est peut-être la toute première fois où la fibre nationale a vibré au contact de la diplomatie russe. Aussi les quelques lignes, que j’ai écrites à la hâte sous le coup même de l’impression, ont-elles eu un sort tout particulier. — Comme s’était le premier bulletin de la victoire remportée, arrivé de Moscou, elles ont été aussitôt communiquées en haut lieu, à l’Impératrice d’abord, qui avait, à ce qu’il paraît, exprimé des doutes sur l’impression que le ton général des dépêches produirait à Moscou. — Puis la lettre ayant été lue par l’Empereur, celui-ci a dit qu’elle aurait dû être communiquée à Mlle Anna, pour l’amener à des sentiments plus favorables au Vice-Chancelier. C’est le P<rinc>e Gortch<akoff> lui-même qui m’a conté cela. — Hier j’ai dîné chez lui à Tsarskoïé et j’ai recueilli des détails très curieux sur ce qui s’y est passé dans ces derniers temps, dans la question Constantin. — L’Empereur, au dire de tout le monde, s’est admirablement conduit dans toute cette affaire. Il a su concilier dans une mesure parfaite sa tendresse très vive pour son frère avec une fermeté à toute épreuve. Aussi on peut considérer le règne malencontreux de celui-ci comme fini. C’est demain, le 27, qu’il quitte Varsovie, avec femme et enfants, et se dirige par Vienne et le Danube en Crimée. Tous ceux qui l’ont vu ici s’accordent à dire qu’il faisait pitié à voir, tant il se sentait écrasé par la défaveur publique. C’est demain aussi que partiront les réponses du P<rinc>e Gortchakoff, très laconiques cette fois, et déclarant la question fermée, sinon décidée. Elles ne tarderont pas à paraître dans les journaux. — L’Empereur s’en va le 31 en Finlande, où il fera le 3 septembre l’ouverture de la Diète. Le 4 il assistera à une grande fête que Mad<ame> Aurore lui donne dans sa maison de campagne, près d’Helsingfors; le 8 il sera de retour à Tsarskoïé et quelques jours après il part p<our> Livadia. — Et ceci me ramène à ce qui est l’objet de mes soucis non moins que des tiens, à notre pauvre chère Daria. Assurément, une fois la cure finie, ce qu’elle aurait de mieux à faire, c’est d’aller rejoindre l’Imp<ératrice> en Crimée — si c’est pour y passer l’hiver, mais cent fois non si c’est pour en revenir au mois de novembre. Mais, alors, que doit-elle faire d’ici dans quelques semaines? Où et comment passera-t-elle l’hiver? Je ne puis songer à cette pauvre chère fille non seulement sans tristesse, mais même sans remords.